Entre touristes et banquiers de la City, ils campent devant l’église de Saint Paul depuis samedi dernier et s’organisent pour la durée.
Environ 2000 personnes à Londres ont participé samedi dernier à la Journée mondiale des Indignés, mouvement de protestation contre les politiques adoptées en conséquence de la crise économiques et les injustices générées par le système capitaliste mondial.
Initialement prévue, une occupation du London Stock Exchange, lieu symbolique du capitalisme financier, à l’instar de l’occupation de Wall Street à New York qui dure depuis un mois. Cependant, le regroupement a finalement eu lieu à proximité, devant la cathédrale de Saint Paul, des barrières de police empêchant les manifestants d’accéder à la bourse. Un campement est maintenant installé, et réuni près de 200 tentes depuis samedi.
Revendications: justice sociale et réelle démocratie
“We are the 99%” lit-on sur les pancartes. Ce mot de ralliement mondial dénonce la concentration des richesses, et appelle à un système économique plus juste.
L’une des principales revendication adoptée est une juste répartition des richesses. Mais plus qu’une simple redistribution des revenus, le mouvement appel à une réflexion sur l’économie actuelle et sa logique aveugle de croissance, perçue comme insoutenable sur le long terme. Une énorme banderole “Capitalism is crisis » domine d’ailleurs l’ensemble du campement.
Le campement sur Saint Paul Churchyard, rebaptisé Tahrir Square, a su se faire accepter des autorités et force de l’ordre, notamment depuis dimanche matin lorsque le révérend Dr Giles Fraser a appuyé la cause des participants. La police s’est dès lors montrée plus coopérative, acceptant de retirer les barrières initialement prévues pour préserver l’accès aux commerces et banques donnant sur la place. En contrepartie, les manifestants ont mis en place leur propre délimitation du campement, fait de cordages et de messages multicolores inscrits à la craie.
Spontanéité et organisation
Cet été, alors qu’en Espagne et dans certaines villes françaises les indignés occupaient les places des grandes villes, rien de tel ne s’est produit en Grande Bretagne. Néanmoins, les indignés britanniques se sont organisés dès samedi, avec la mise en place de différents ateliers pour faciliter la prise de parole et l’échange d’idées.
Le mouvement reflète la diversité londonienne, et bénéficie de l’expérience d’activistes d’autres nationalités, notamment espagnole.
Un mot d’ordre: le pacifisme. L’image du mouvement est importante, pour rallier à sa cause le plus grand nombre. Par exemple, l’assemblée générale a décidé de proscrire la consommation d’alcool sur le site.
Il s’agit d’organiser un espace ouvert, permettant d’échanger et de communiquer des idées, mais aussi un lieu d’apprentissage. L’objectif est d’ouvrir un dialogue non seulement entre les participants mais aussi avec le plus large public.
Dimanche soir, lors de l’assemblée générale, une charte de neufs points a été adoptée au consensus. « Nous voulons un changement structurel vers une authentique égalité mondiale. Les ressources mondiales doivent être dirigées vers sa population et la planète, et non les militaires, le profit privé ou les riches. » Elle a été acceptée comme un «travail en cours», un « reflet de l’état d’esprit présent » plutôt que quelque chose de définitif.
Des ateliers avec des thématiques variées telles que media, animation, éducation mais aussi relatifs au fonctionnement du campement lui même ont permis à chacun de partager ses idées et de s’investir personnellement dans différentes actions. Aidés par des donations privées, des espaces presse et université gratuite ont vu le jour. La première conférence à eu lieu lundi, et un programme se met en place pour les jours à venir. D’autres ateliers visant à diffuser des connaissances plus pratiques, comme l’électricité ou la mécanique, sont également en préparation. Pour assurer le bon fonctionnement du campement, une collecte de déchets s’est rapidement mise en place, ainsi qu’un espace cuisine, distribuant des repas gratuits grâce aux donations alimentaires de commerces locaux et aux opérations de glanage. Des pizzas ont même été livrées gratuitement sur le site dimanche soir.
Alors que l’organisation se perfectionne, de nouvelles questions se sont soulevées, notamment la façon de gérer collectivement et utiliser les nombreuses donations financières en l’absence de compte bancaire. Les donations alimentaires sont aussi sujettes à un débat d’ordre éthique, puisque certaines proviennent de chaînes multinationales. Il a ainsi été décidé que les donations de Mac Donald’s seront refusées.
Un mouvement ouvert
Le regroupement, en plein coeur de Londres, entre les flashs des curieux, journalistes et touristes et les pas pressés des banquiers de la City, fonctionne comme une pépinière. L’ambiance est festive, presque familiale, avec les musiciens et artistes de rue et distribution de nourriture gratuite. De nombreux nouveaux ateliers voient le jour, tel qu’un atelier de réflexion sur l’économie alternative. En constante discussion est la façon d’inclure le plus grand nombre, y compris les banquiers de la City. Des visites guidées du campement ont commencées aujourd’hui. Les indignés sont donc en train de se faire une place au coeur de Londres et nouvelles tentes continuent de s’installer chaque jours.